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ESSAIS de CHARGEMENT sur le FOURNEAU 1 d' HAYANGE       31.5.46

Ce fourneau est muni d'un cône de 2 m.60 de diamètre, à l'intérieur d'un cylindre en tôle, dit de protection, de 3 m.80 de diamètre, pour un diamètre de 4 m.60 au gueulard. Le jeu radial entre le cône et le cylindre de protection ressort ainsi à 0 m.60; et le jeu radial entre le cylindre et la maçonnerie du gueulard est de 0 m.40. Le fourneau est muni de deux prises de gaz latérales, dont le radier se trouve au-dessus du plan de l'arête inférieure du cylindre de protection. Il s'ensuit que les gaz, pour s'échapper, doivent se laminer dans l'étroit passage de 400 mm ménagé entre le cylindre de protection et la maçonnerie.

1°- Dans son état actuel, la maçonnerie du haut de la cuve présente, en dessous de la tranche inférieure du cylindre de protection, une usure irrégulière, et considérable sur certains rayons Sur un secteur de 600 l'usure radiale à 1 m.de profondeur est limitée à 50 cm; sur un secteur de 120°, à l'opposé du précédent, elle atteint 60cm à 1 m.de profondeur et 1 m.50 à 2 m.; sous une prise de gaz, elle n'est que de 60/70 cm, mais sous l'autre, elle s'élève à 1 m.60/1 m.80.

Étant donné l'influence capitale, quant à la distribution des matières, du jeu entre l'appareil de chargement et la paroi du* haut-fourneau, il n'est pas possible qu'aucune méthode de chargement parvienne à assurer une distribution acceptable avec des jeux aussi différents.

La première condition pour qu'un fourneau puisse être correctement chargé est que son rayon au gueulard soit uniforme et constant. Nos fourneaux, comme tous les fourneaux du monde, ont besoin à cet effet que leur maçonnerie sur toute la hauteur du gueulard intéressée par le chargement, soit protégée par un blindage, que l'on peut réaliser avec des éléments de tôle épaisse scellés dans les joints des briques, ou avec des barres repliées et jointives, accrochées au sommet de la maçonnerie.

 

2° - Le cylindre de protection qu'on rencontre sur tous nos fourneaux, parait jouer un rôle singulier. En effet, il a été constaté que lorsqu'on cède le coke, peu de morceaux heurtent la tôle de protection. Les plus gros seuls frappent des points de la tôle voisins du bord inférieur et sont alors rejetés vers le centre. Lorsqu'on cède le minerai, il tombe d'abord, presque à la verticale, une pluie de poussières filtrant à travers les morceaux qui se mettent en mouvement; et ces poussières se déposent au rayon de 4 m., visiblement sans rencontrer la tôle de protection. Ensuite, tombent les petits morceaux; et les plus gros, qui restent coincés assez longtemps, frappent la tôle de protection sur une hauteur allant jusqu'à 600 mm, et sont rejetés vers le centre du fourneau.

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Ainsi, la tôle de protection n'a d'autre effet que de  renvoyer vers le contre les plus gros morceaux de coke est les gros moreaux de minorai; c'est-à-dire d'augmenter la perméabilité de le région axiale du fourneau.

D'autre part, le cylindre de protection lamine les gaz au voisinage des prises et les oblige à traverser un espace annulaire étroit, avec augmentation considérable de leur vitesse. D'où des entrainements de poussières excessifs.

La mauvaise conception de nos gueulards est la raison principale de notre échec avec nos grands fourneaux. Nos idées à ce sujet ont besoin d’être ravisées. Les trous dont le cylindre de protection du fourneau 1 de M0YEUVRE a été pourvu ne sont pas une solution : ils imposent aux gaz un trajet détourné, et la perte de. charge liée à l'orifice en minces parois. Il faut supprimer les cylindres de protection.

3° - de l'usure de la maçonnerie au niveau des charges au fourneau 1 de HAYANGE, cependant que le diamètre primitif du gueulard est conservé dans le plan de l'arête inférieure du cylindre de protection, il résulte des encorbellements de maçonnerie, qui rejettent vers le centre du fourneau les gaz montant le long de la paroi. Ces gaz doivent tourbillonner, pour réussir ensuite à s'échapper entre la paroi et le cylindre. Il y a là une cause supplémentaire d'exagération des poussières. Si on devait remettre le fourneau 1 d'HAYANGE en route dans son état actuel, la première chose è faire serait de couper la maçonnerie de ces encorbellements De même, dans un fourneau neuf, il convient, pour permettre aux gaz de se détendre en abandonnant leurs poussières, de leur offrir la plus grande section de passage possible en coupant la maçonnerie en oblique dès le niveau des charges.

4° - Les expériences de MM. GOF LTTE et MAILL.ART mettent bien en évidence l’influence du jeu radial entre le cône et la maçonnerie. Là où la maçonnerie est peu ou pas usée, c'est-dire où ce jeu est de l'ordre de 0 m.90 à 1 m., le chargement est relativement correct : les 6.000 Kgs de coke se déposent, sur le talus de minerai, en une coche de 60 cm d'épaisseur à la paroi et de 30 à 40 cm au centre le talus d'éboulement du coke étant plus incliné que celui du minerai. Sur le coke, la charge da 20.000 kg de minerai se dépose en une couche de 60 cm à la paroi et de 60 cm au centre. Le chargement réalisé est presque en V, avec seulement un petit contre-talus vers la paroi.

Au contraire, là où le gueulard est fortement élargi, le coke glisse vers la paroi en couche mince comme vers l'axe du fourneau; et le minerai, par suite de son rebondissement beaucoup plus marqué sur le cylindre de protection, n'arrive pas à gagner la paroi. La conséquence de l'usure de la maçonnerie est donc qu'en face des parties les plus usées il n'y a guère que du coke qui est très perméable; d'où. à ces endroits un passage préférentiel des gaz, qui contribue à activer l'usure de la maçonnerie. Ce processus désastreux renforce la nécessité de blinder les gueulards.

 

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J'aurais une observation à faire en un qui. concerne la manière dont les essais ont été conduits. Avant chaque charge le fourneau a été vidé par les chapelles aussi uniformément que possible pour simuler la descente en service. Le profil de la charge auquel cette procédure aboutit n'est peut être pas exactement celui qu'on aurait en marche, mais il n'y avait guère moyen de faire autrement. Par contre il eut été bon, préalablement à l' étude de la répartition d'une charge déterminée, de mettre cette charge une ou deux fois et de vider le fourneau, parce que le profil auquel conduit la descente est susceptible de varier suivant la manière dont les charges précédentes ont été faites. De ce point de vue la méthode suivie, qui a consisté à rendre horizontal le dessus du fourneau, puis à charger 4 skips de coke, laisse un doute quant à l'identité de la surface sur laquelle a  été étudiée la répartition du coke et de la surface que l'on aurait eue réellement en service, en chargeant régulièrement 4 skips-de coke, puis 4 skips da minerai.

5°- Le poids de la charge est un puissant moyen à la disposition du chef de fourneau pour régler la répartition des matières au gueulard. Les effets de la différence entre les talus d'éboulement du coke et du minerai s'amplifient d'autant plus que la charge est plus petite. Les essais montrent nettement qu'en chargeant 6 skips de mine au lieu de 4, on obtient une répartition du minerai nettement plus uniforme; et qu'en particulier le talus du minerai est alors assez haut pour que du minerai descende jusque dans les régions les plus élargies du gueulard.

Or, le volume du pétrin du fourneau 1 d'HAYANGE, n'étant que de 16 m3, ne permet de charger à la fois que 4 skips de mine, ou 4 skips de coke, ou 2 skips de mine et 2 skips de coke : soit 20 T. de minerai ou 6 T. de coke.

En fait, certains grands fourneaux américains reçoivent des charges de 25 T.de mine, mais pour des diamètres au gueulard de l'ordre de 6m. Il semble que des charges de 20 T. dans le cas de gueulards de 5 m. laissent des possibilités de manœuvre suffisantes .

6° - Sous la réserve qu'un chargement mixte préalable aurait peut être modifié le profil de la surface initiale des matières, le chargement simultané de 2 skips de coke plus 2 skips de mine déposés successivement sur le cône semble donner dans les conditions du fourneau 1 d'H AYANGE, dz meilleurs résultats que le chargement séparé, quant à la régularité de la répartition.

Cependant, ce n'est qu'en service que l'on pourra porter un jugement sur les mérites respectifs des deux méthodes. S'il est en effet assez facile, dans le cas de charges séparées, en relevant les profils et en planimétrant les surfaces, d'estimer les différences de proportion de coke et de minerai au centre du fourneau, dans la zone intermédiaire, et à la paroi, la même estimation est beaucoup plus difficile quand le coke est mélangé au minerai. De plus, ce qui importe avant tout est la perméabilité qui découle non seulement des proportions de coke, mais des calibres; et  l’observation directe du flux gazeux est bien préférable à toutes les déductions.

 

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Des prélèvements de gaz et des mesures de température dans la masse des matières au gueulard sont extrêmement faciles à effectuer. La température est assez basse pour qu'on n'ait même pas besoin de tubes à circulation d'eau. Mais pour savoir réellement ce qui se passe dans le fourneau, il faudrait effectuer simultanément des prises et des mesures de température au bas de la cuve; et l’appareillage à employer est plus délicat.

De tels essais peuvent s'envisager une fois, pour la mise au point d'un mode de chargement. Pour le contrôle du haut-fourneau: c'est-à-dire pour prévenir les irrégularités de répartition des gaz et la formation de garnissages, je conseille de noyer 4 couples dans la maçonnerie de la cuve, à quelques mètres en dessous du gueulard, et aux extrémités de deux diamètres perpendiculaires : la comparaison des températures relevées décèle toute anomalie qui se prépare.